mercredi 20 mai 2009

Les contrats – Quelques notions essentielles


1. Le contrat est la loi des parties !

Cette expression reflète en fait, une réalité simple : tant et aussi longtemps que les termes d’une entente ne vont pas à l’encontre de dispositions contrevenant à l'ordre public, deux personnes, appelées les « parties », sont libres de convenir des conditions qu'elles veulent.
Bien que le Code civil du Québec et d’autres lois statutaires encadrent la formation et le contenu des contrats, il est important de savoir qu’il est loisible aux parties d’écarter certaines règles de droit et de fixer elles-mêmes les règles du jeu.
Tout entrepreneur conclut régulièrement des contrats. Qu’il soit verbal ou écrit, le contrat est tout aussi valide. Par contre, à défaut de prévoir un écrit, la preuve de son contenu sera plus difficile.
Voyons quelques notions relatives aux contrats en général.

2. Formation du contrat

Le contrat se forme lorsqu’il y a rencontre des volontés des parties. Dès lors, un échange de consentement libre et éclairé entre les contractants établit entre eux un lien juridique comportant habituellement des obligations et des droits pour chacun d’eux. Doit-on absolument signer un document pour former un contrat? La réponse est NON. La signature constitue une preuve de consentement quant au contenu du document signé. En affaires, même un écrit non signé peut servir de preuve pour constater un acte juridique (paiement, contrat, etc.). La preuve d'un contrat verbal peut se faire par différents moyens (témoins, circonstances, par aveu) mais elle risque d'être malaisée. Sachez aussi qu'un contrat écrit ne peut normalement être contredit par témoignage ce qui n'empêche toutefois pas le témoignage pour l'interpréter.

3. Les composantes essentielles

Le contrat doit comporter l’identification des parties, l’objet de celui-ci, la contrepartie (prix) ainsi que les modalités de paiement. Bien que cela paraisse simpliste, on rencontre malheureusement des situations où l'on peine à déterminer à qui s’adressent les obligations du contrat, soit que l'une des parties a omis de s’identifier ou que les termes de l'entente souffrent d'ambiguïté. De telles imprécisions peuvent causer des problèmes à celui qui invoque un droit, soit souvent l’entrepreneur.

4. Les composantes intéressantes

L’apport du client


Le travail à réaliser est souvent tributaire de certains apports du client, que ce soit en disponibilité, en information ou en matériel. Trop souvent, on oublie de lier la performance de la prestation à l’accomplissement des obligations du client. Il peut donc s’avérer intéressant de prévoir la nature et l'étendue des apports du client ainsi que les délais dans lesquels ces apports doivent être réalisés. À défaut de prévoir un calendrier, on peut prévoir un mécanisme d’avis écrit pour pouvoir exiger l’exécution des obligations du client, à défaut de quoi, les obligations de l'entrepreneur seront éteintes ou amoindries.

Obligation de moyens ou de résultats ?

Puisqu’un contrat génère des obligations, mieux vaut tenter de les minimiser surtout lorsque celles-ci dépendent de facteurs externes. Au lieu de laisser place à l’interprétation éventuelle du client ou pire, des tribunaux, il est souhaitable de limiter l’étendue de l’obligation en la qualifiant « d'obligation de moyens ». L'engagement se limite alors à prendre « tous les moyens raisonnables » pour accomplir l’objet du contrat et ne résulte pas ainsi, en une garantie absolue d’un résultat quelconque. Par exemple, cela s’applique bien au technicien en informatique qui tente de « déboguer » le matériel informatique de son client. Il peut difficilement s’engager à obtenir un résultat parfait sans perte de données ou autres incidences malencontreuses, mais prévisibles.

Frais de crédit et sûretés

Qu’arrivera-t-il si votre client ne paie pas sa facture selon les modalités établies? Vous devrez patienter ou entamer des mesures de recouvrement. À défaut d’avoir prévu des frais d’intérêts pour retard (ex. : 2 % par mois avec mention du taux annuel), les seuls intérêts exigibles seront ceux prévus par la loi, soit 5 % par an, à compter de la mise en demeure. Le créancier a donc intérêt à réclamer son paiement rapidement.

Aussi, comment se protéger à l'égard des mauvais payeurs? Outre des mécanismes plus complexes et coûteux, la réserve de propriété est un moyen simple et sans frais qui vous accorde une certaine protection. Selon le cas, il est possible d’ajouter une mention au contrat spécifiant que la propriété du bien vendu demeure celle du vendeur jusqu’à parfait paiement du montant convenu. Cela permet de faciliter la reprise éventuelle du bien ou même, la publication d’un droit réel aux registres publics. Par contre, il faut ajouter qu'en demeurant propriétaire, le vendeur supporte certains risques pour lesquels il devrait obtenir une assurance.

Limitation de la responsabilité

Il est parfaitement légal de limiter sa responsabilité éventuelle. Une petite erreur de la part d’un entrepreneur peut entraîner des pertes très importantes pour le client. Pensons au vendeur de matériel informatique qui limite couramment sa responsabilité quant aux pertes de données, limitant son obligation au remplacement du matériel. Cet exemple s’applique à la quasi-totalité des services ou des produits qui peuvent être offerts. Il est important de limiter sa responsabilité dans les limites de ce qui peut être raisonnable.

Juridiction et droit applicables

De plus en plus, nous voyons des contrats s’établir entre des parties qui sont géographiquement éloignées. Il est bon de savoir qu’on peut prévoir dans le contrat, le district judiciaire (le lieu) où pourra être entendue une éventuelle poursuite ainsi que le droit applicable. Ainsi, une entreprise lavalloise concluant un contrat avec un client de l’Ontario dans cette province peut stipuler que le droit québécois régira le contrat et que les tribunaux du district de Laval seront seuls compétents à entendre une cause à ce sujet. En l’absence d’une telle clause, le droit de l’Ontario s’appliquera et tout litige devra être entendu en Ontario. On imagine alors les frais supplémentaires qui peuvent en découler.

Signature et date

Enfin, pour éviter tout malentendu et simplifier la preuve de vos droits, mieux vaut signer le contrat et dater le tout. C’est une question de bon sens!

5. Conclusion

Les gens en affaires tireront grand avantage à établir un contrat type, adapté à leurs produits ou services, avec l'objectif de maximiser leur protection et de minimiser leurs obligations et leur responsabilité. Il ne s'agit pas d'apeurer le client avec une brique à sens unique en caractères minuscules, mais d'avoir un contrat clair qui, sans exagération, encadre complètement la transaction réelle et limite les possibilités d'interprétation.

Retrouvez tous les détails et d'autres chroniques sur le site internet des Avocats d'affaires Dupuis Paquin, avocats à Laval.

vendredi 15 mai 2009

Les formes juridiques d’entreprises : avantages et inconvénients


Quelle forme juridique d’entreprise privilégier ? Cette décision est très importante, car elle aura un impact majeur sur les obligations et les responsabilités des personnes liées à l’entreprise.

1. L'entreprise individuelle

L’entreprise individuelle est certainement la plus facile, la plus rapide et la plus simple des formes d’entreprises. N’importe qui peut s’improviser « entrepreneur » et offrir ses services sur-le-champ. La seule obligation à observer, si le nom de votre entreprise ce contient pas vos prénom et nom, est de vous immatriculer auprès du Registraire des entreprises du Québec : un simple formulaire à remplir et des frais de 32 $ à acquitter. Aucun contrat n'est nécessaire.

Cette forme est réservée à un individu. Il supporte personnellement toutes les responsabilités de l’entreprise. L'entreprise individuelle n'est pas une personne morale ni même une personne distincte de l'individu qui l'exploite. Tous les biens et les dettes, autant de l’entreprise que de l’individu, sont confondus. La responsabilité de l'individu est illimitée, c'est-à-dire qu'une dette née de l'exploitation de l'entreprise peut être recouvrée à l'égard de tous les biens de l'individu et non seulement ceux qui concernent l'entreprise.

Sur le plan fiscal, les profits de l’entreprise s'ajoutent aux autres revenus de l'individu. La différence entre un revenu d'emploi et le revenu provenant d'une entreprise est que, dans le premier cas, les déductions sont très limitées et doivent expressément être prévues par les lois fiscales. Dans le cas du revenu d'entreprise, la règle générale veut que les dépenses raisonnables engagées en vue de tirer un revenu de l'entreprise soient déductibles de ce revenu. L'individu qui possède des revenus de sources diverses et qui est déjà imposé au taux marginal maximal verra ses revenus d'entreprise imposés au taux maximal. Par contre, une perte d'entreprise pourra réduire ses revenus d'autres sources. Outre l’aspect fiscal, la responsabilité illimitée de l’individu constitue l’élément majeur à considérer.

2. Société

Les sociétés de personnes regroupent des personnes (physiques ou morales) afin de réaliser une activité dans le but de se partager des bénéfices. Les sociétés sont en nom collectif, en commandite ou en participation. La formation d'une société repose sur une entente contractuelle, sur une volonté commune de s'associer. Mise à part la société en participation, l’immatriculation d’une société est obligatoire auprès du Registraire des entreprises : un simple formulaire à remplir et des frais de 43 $ à acquitter. La société peut choisir un nom autre que celui formé par les noms des associés. La déclaration faite auprès du Registraire est celle qui est opposable aux tiers qui peuvent toutefois tenter de contredire les mentions d'une déclaration par tous moyens.

Une société n’est pas une personne de droit distincte. Elle possède cependant certains droits, notamment la capacité d’ester en justice sous le nom déposé auprès du Registraire. Sur le plan fiscal, les profits sont répartis entre les sociétaires pour inclusion dans leur déclaration fiscale personnelle. La caractéristique importante à considérer demeure la responsabilité illimitée et solidaire des personnes qui la composent envers les dettes de la société y compris celles découlant des engagements des associés à l'égard des activités de la société.

La société de personnes en nom collectif réunit des personnes qui déterminent, entre elles, l’apport de chacun dans la société, leurs rôles ainsi que leur part des profits. La responsabilité à l'égard des dettes est illimitée et solidaire. Les biens personnels des associés peuvent servir à rembourser des créanciers impayés. La confiance entre les associés et la société doit être grande. Les associés devraient signer un contrat écrit. À défaut, le contrat est verbal ce qui causera des problèmes de preuve dans bien des cas (différends, décès, séparation de conjoints). De plus, à défaut de contrat écrit ou de preuve concluante quant à certains aspects de la société, la loi prend le relais et impose sa solution (par ex. : à défaut de détermination dans le contrat, la part de chaque associé dans les profits et pertes est réputée égale entre les associés)

La société en commandite combine des aspects de l’incorporation et de la société en nom collectif. Il existe deux catégories de sociétaires : les commandités et les commanditaires. Les commanditaires pourvoient les fonds. Leur responsabilité est limitée à leur investissement à la condition qu’ils ne jouent aucun rôle actif dans la société. Les commandités gèrent la société et supportent toutes les responsabilités comme pour une société en nom collectif. Les deux groupes de sociétaires participent aux bénéfices. Bien que pouvant être utilisée dans plusieurs circonstances, on voit souvent des sociétés en commandite formées pour la détention et la gestion d'immeubles.

La société en commandite combine des aspects de l’incorporation et de la société en nom collectif. Il existe deux catégories de sociétaires : les commandités et les commanditaires. Les commanditaires pourvoient les fonds. Leur responsabilité est limitée à leur investissement à la condition qu’ils ne jouent aucun rôle actif dans la société. Les commandités gèrent la société et supportent toutes les responsabilités comme pour une société en nom collectif. Les deux groupes de sociétaires participent aux bénéfices. Bien que pouvant être utilisée dans plusieurs circonstances, on voit souvent des sociétés en commandite formées pour la détention et la gestion d'immeubles.

Les principales différences entre la société en participation et la société en nom collectif sont premièrement que cette dernière a un nom tandis que la société en participation n'a pas de nom propre. Celle-ci fonctionne sous le nom des individus qui n'ont alors pas l'obligation de s'immatriculer. En cas de poursuite contre eux pour des activités de la société, les associés ne peuvent exiger que les créanciers poursuivent d'abord la société et fassent vendre ses biens. Les créanciers pourront poursuivre l'un ou l'autre des individus qui pourra être tenu personnellement responsable des dettes de la société. On peut penser, en pratique, que le créancier poursuivra celui des associés qui lui paraîtra être le plus solvable.

La société nominale ou de dépenses n'est pas une véritable société. C'est plutôt une entente contractuelle visant à partager des dépenses communes. Les parties à cette entente visent à exercer leur entreprise de façon individuelle et n'ont pas l'intention de partager leurs revenus.

La société en nom collectif à responsabilité limitée (s.e.n.c.r.l.). Cette société obéit aux règles de la société en nom collectif, mais comme son nom l'indique la responsabilité des associés est limitée. Ces sociétés sont permises pour les membres d'un ordre professionnel visé par le Code des professions (il en existe une quarantaine). L'article 187.14 du Code des professions se lit ainsi :


Le membre d'un ordre qui exerce ses activités professionnelles au sein d'une société en nom collectif à responsabilité limitée n'est pas personnellement responsable des obligations de la société ou d'un autre professionnel, découlant des fautes ou négligences commises par ce dernier, son préposé ou son mandataire dans l'exercice de leurs activités professionnelles au sein de la société.

Il s'agit d'une responsabilité limitée, mais à l'égard des fautes professionnelles seulement. Les associés sont solidairement responsables des autres dettes de la société. Les associés doivent nécessairement conclure un contrat écrit et le nom de la société doit comporter les mots ou l'abréviation « s.e.n.c.r.l. ». Différentes formalités peuvent aussi s'appliquer en raison des exigences de l'ordre professionnel ayant autorité en l'espèce.

3. Les compagnies

La constitution d'une compagnie (incorporation) peut être effectuée en vertu de la loi fédérale (Loi canadienne sur les sociétés par actions) ou de la loi provinciale (Loi sur les compagnies). On peut utiliser indifféremment le mot compagnie ou le mot société pour parler d'une compagnie. La compagnie est une société par actions. La distinction la plus fondamentale entre une société par actions et une société en nom collectif, en commandite ou en participation réside dans le fait que la société par actions est une personne morale distincte de ses actionnaires. Elle obéit aussi à des lois et des règles différentes de celles des sociétés traitées ci-dessus. La délivrance de statuts constitutifs donne « naissance » à une nouvelle personne juridique (une personne morale) qui possède son propre patrimoine ainsi que sa propre responsabilité. La constitution d'une compagnie nécessite des démarches différentes de celles d'une société afin d’être mise en place ainsi que des frais plus importants. Si elle succède à une entreprise individuelle, un roulement fiscal des biens est parfois nécessaire afin que le transfert des biens de l'individu puisse s'effectuer sans impact fiscal de l'individu à la compagnie.

Outre les droits d’incorporation gouvernementaux ( 250 $ et 300 $ pour ceux-ci et généralement des frais additionnels pour l'avocat qui se chargera des démarches), la compagnie doit tenir différents livres et registres concernant sa structure et ses opérations. La compagnie est administrée par un conseil d’administration qui peut nommer des dirigeants. Les actionnaires élisent chaque année les administrateurs et contrôlent ultimement la compagnie.

La compagnie obéit à une fiscalité propre aux compagnies et produit évidemment une déclaration de revenus distincte de celle de ses actionnaires. Les administrateurs de la compagnie possèdent des devoirs et obligations pouvant engager leur responsabilité personnelle dans certaines circonstances. Les principaux avantages sont la limite de responsabilité des propriétaires (actionnaires) ainsi que les taux d’imposition habituellement plus faibles. Alors que le taux marginal pour un individu (fédéral et provincial s'appliquant sur la dernière tranche de revenus dans notre système où l'impôt est progressif) avoisine 50 % , le taux d'impôt supporté par une entreprise admissible à la déduction pour petites entreprises (revenus d'entreprise exploitée activement et plafond de 400 000 $) est d'environ 20 % . On constate alors que pour chaque 100 $ dollars de bénéfice net, l'individu dispose de 50 $ pour réinvestir, mais que la compagnie dispose elle de 80 $. Éventuellement, la différence de 30 $ sera transmise aux individus et taxée mais entretemps la compagnie bénéficie d'un report d'impôt très significatif. Par ailleurs, il n'est pas intéressant fiscalement de s'incorporer afin de percevoir des revenus de biens (loyers, dividendes, intérêts) dans la plupart des cas, car ces revenus ne sont pas considérés être du revenu d'entreprise exploitée activement et sont assujettis à un taux d'impôt équivalent ou supérieur à celui de l'individu.

4. Les coopératives

La coopérative est assez méconnue comme forme d’entreprise. La coopérative est régie principalement par la Loi sur les coopératives. Sa mise en place donne « naissance » à une personne morale distincte de ses membres. Elle nécessite douze fondateurs pour le dépôt de statuts constitutifs auprès du ministère du Développement économique. Un conseil d’administration gère la coopérative et tient un registre de ses décisions, prépare les états financiers et produit les déclarations de revenus. La coopérative possède son patrimoine, ses dettes et ses responsabilités.

Les membres-propriétaires ont habituellement un seul droit de vote chacun sans considération de leur apport respectif; le pouvoir est accordé aux individus plutôt qu’à leur richesse. Les bénéfices tirés de la coopérative par un membre sont habituellement proportionnels à l’utilisation des services de la coopérative par le membre. Les ristournes aux membres permettent le partage des surplus en fin d’année.

Il existe aux Québec des coopératives forestières, financières, d’habitation, de travailleurs, de services funéraires, de consommation et beaucoup d’autres. La plus connue, le Mouvement Desjardins est une immense coopérative de services financiers qui regroupe, entre autres, un ensemble de Caisses populaires. Les Coopératives de développement régional (CDR) soutiennent le démarrage d’entreprises sous forme coopérative.

Mieux vaut vous assurer de choisir la forme juridique la plus appropriée à votre situation afin d'optimiser les avantages possibles et de bien concevoir les inconvénients potentiels.